Si les politiques culturelles sont le plus souvent au coeur de mes propos, l'urbanisme a toujours été un sujet d'intérêt pour moi. Cela remonte à l'époque où je préparais mon Capes d'histoire-géographie. Nous avions à préparer tout au long de l'année la question suivante :"centre ville et périphéries".
J'ai eu alors les meilleurs professeurs de Lyon . J'ai fait "péter" ma note à l'écrit du capes : 16/20 .
Ne l'ayant pas oublié je caresse le projet de faire un master 2 d'urbanisme...J'ai pris quelques contacts ici ou là dès l'an dernier.
Mes voyages hebdomadaires à travers la France, mon quotidien dolois me font relever un phénomène somme toute récent : la (re)paupérisation et la (re)dégradation des centres villes.
Il y a 40 ans on a engagé la "reconquête" des "centres anciens" dégradés, lépreux , sans confort alors que l'on trouvait dans les grands ensembles périphériques toutes les illustrations de la modernité : chauffage central, salle de bain, ascenseur etc etc. Cette "reconquête" s'est faite à coup de rues piétonnes, de ravalements de façades , de choix de mobiliers urbains adaptés( le drame à mon sens du candélabre "montmartre" qui a poussé dans toute la France...)et d'opérations d'améliorations de l'habitat. Le boucher laissait sa place à un traiteur, le brocanteur à un antiquaire...Bref on a assisté à un phénomène de "gentrification", les jeunes cadres occupant les logements laissés vides par le plus souvent de vieils gens longtemps protégés par la loi dite de 1948.
Les années 80/90 ont connu l'apogée de ce phénomène. Combien de fois avons nous entendu des visiteurs de Dole nous dire qu'ils gardaient une image noire et sale de notre cité dans le passé alors qu'ils découvraient un ensemble rénové...c'était déjà hier!
On a parlé alors de retour du piéton dans la ville, de re"sociabilisation des centres . Quel maire n'avait pas l'ambition de drainer le tourisme culturel avide de patrimoine bâti ?
Force est de constater que cette politique a été menée avec succès à Dole comme dans d'autres villes d'ailleurs. Je me souviens du décompte triomphant lors des élections municipales de 1995, du nombre d'appartements de centre ville hier en décrépitude et qui avaient été réhabilités et désormais occupés. Cela aussi c'était déjà hier!
Les années 2000, dans les villes moyennes, ont connu des phénomènes déstabilisants et cumulatifs : un emballement de la spéculation immobilière,des incitations fiscales favorisant la réhabilitation à vocation sociale, la multiplication des grandes surfaces spécialisées aux périphéries et pas à pas l'asphyxie des rues adjacentes à l'hyper centre piétonnier par les automobiles . Les conséquences n'ont pas été perceptibles immédiatement .
D'une part les réhabilitations sont devenues hors de prix et le parc bâti est délaissé par les "petits" investisseurs ; d'autre part la mythique "mixité sociale"mal préparée engendre un départ des classes moyennes pour des périphéries pavillonnaires et enfin les commerces indépendants épuisés de lutter à armes inégales face à des grandes enseignes de plus en plus spécialisées ferment les uns après les autres.
Le constat saute aux yeux partout, à Dole comme souvent ailleurs : habitat de centre ville qui retourne à la léprosité, rupture de "l'urbanité" de voisinage par la multiplication des tapages nocturnes comme diurnes, alignement de commerces à vendre. La spirale est infernale et bien connue : fléchissement des prix de l'immobilier, disparition des investisseurs , départ accéléré des classes moyennes actives,mobilier urbain vandalisé, tags à profusion, épuisement des collectivité à limiter la casse...Ce phénomène, les villes américaines mais aussi Sud africaines l'ont subi il y a déjà longtemps .
Faut-il le dire ? Parallèlement il a fallu réorganiser les périphéries nées de la pression démographiques d'après guerre et du cerveau embrumé d'urbanistes marqués tant par le fonctionnalisme que par un marxisme/maoïsme à deux sous...mais c'est un autre sujet, qu'il conveint lorsque l'on est en capacité d'agir de traiter conjointement.
Bref l'urbanité est à réinventer, beau défi pour les édiles de demain. Mon ami Philippe Laurent, maire de Sceaux lorsqu'il était adjoint au maire avait le beau titre de "maire adjoint à la culture et à l'esthétique urbaine"...